mardi 7 février 2017

Jour après jours, et presque minute par minute, le passé était mis à jour

L'impression que l'on peut avoir en ce moment est une sorte de tirs de leurres.

En effet ça part dans tous les sens. L'administration Trump ressemble à un cauchemar pour rationalistes. Les affirmations lancées par le POTUS et son équipe semblent provoquer une course à la vérification de la part des médias. Ces derniers se perdent dans des contre-articles, forcément biens fournis, inaudibles de la sphère Trump. Deux pays se font face, les faits n'ont plus d'importance. Les décrets sur la dérégulation financière sont passés sous silence au profits d'autres tirs de leurres.

Ceci a été visible ces derniers jours avec notamment la dernière interview de Fox News. The Bill O'Reilly Factor, qui est un show de la chaîne conservatrice Fox news, a relayé l'interview pré-SuperBowl du Président Trump. On parla en 30 minutes de la Russie, du décret sur l'arrêt de l'immigration de 7 pays, du Mexique (de son "good president" et des ses "bad cartels"), des taxes et de l'ObamaCare.

Cette impression est difficile à démontrer mais elle devrait faire consensus. Autant CNN est une chaîne qui sonne anti-Trump, autant le positionnement pro-Trump de la FOX est beaucoup plus flagrant. Ceci fut flagrant quand la question des villes et Etats "sanctuaires" fut abordée. Les représentants de ces Etats et villes ont déclaré qu'ils ne feront pas la "chasse aux migrants". Allant à l'encontre du POTUS. Le journaliste s'offusque du fait que le gouverneur californien ose tenir tête au Président, pour lui demander ensuite comment il analyse ceci.
Dans cette interview le journalisme posa la question suivante au Président, en tout cas c'est peu ou prou ce qu'il dira : "Pourquoi les Démocrates (opposition, ndlr) s'opposent, S'OPOSENT, à protéger les américains contre les violences des criminels étrangers ?"

à 21:00

On voit que la question n'a rien d'un journaliste neutre ou tout du moins essayant de faire justifier au Président des décisions. Là il prend position directement en accusant l'opposition de ne pas vouloir protéger les américains. On fait face là au sophisme du faux-dilemme : seule cette solution est bonne. La question de l'interdiction de ces 7 pays est bien plus complexe. Mais la question, la question, veut faire passer le message que les Démocrates ne veulent pas protéger les américains. Un autre sophisme s’infiltre dans cette question, celui de l'homme de paille, consistant à déformer les propos de l'adversaire fusionné à celui du procès d'intention. Bref.

On a donc eu le droit à une avalanche de rebondissements cette semaine avec un juge qui a temporairement cassé le décret et il y a eu la com' habituelle du POTUS.


Pour justifier ce #MuslimBan comme on dit ici, la Maison Blanche inventa un attentat qui n'a jamais eu lieu. La Bowling Green Attack [Lien]. Pourquoi parle-ton de muslim-Ban, car le candidat Trump parla pendant sa campagne d'interdire le sol américain aux musulmans. Ce qui en droit est compliqué.



Face à l'évidence d'un #AlternativeFact, la com' du POTUS parla d'attentats déjoués ou d'attaques qui n'ont pas été médiatisées. Les médias, pour des raisons idéologiques voudraient cacher aux américains la réalité. C'est la rhétorique très complotiste que l'on retrouve consistant à voir derrière des migrations et attentats, la volonté de forces occultes (juifs, francs-maçons) de bouleverser l'ordre mondial, casser les frontières. Pour l'argent, et aussi pour l'avènement de l'antéchrist. Le 45ème POTUS croit-il à cela, on sait pas. Oui ça existe et aucun lien vers ce genre de document ne sera posté ici. Parier $1 sur une croyance du genre serait pas forcément perdu.

La nouvelle trouvaille du POTUS fut donc d'expliquer que les médias ne couvrent plus les attaques terroristes. Pour les cacher derrière leur idéologie mondialiste multiculturaliste.


Pour continuer, la maison Blanche publia une liste de 78 attaques de part le monde qui ont été inspirées par le terrorisme islamistes qui n'ont pas été médiatisées. On retrouve dans ces attaques l'attentat de Nice ou de San Berdardino. En réalité la totalité de ces attaques ou été couvertes par les médias et on se rend compte qu'il y a eu très peu d'immigrés provenant des pays de la black-list qui étaient impliqués ! Lien Lien.

Enfin le Président ne résiste pas à dénoncer les "faux sondages des médias", faisant de lui le POTUS le plus impopulaire


Mais que restera-t-il de ces épisodes ? Les sites de ré-information à la française deviennent aussi les sources principales d'informations de nombreux citoyens. Alimenté par la boucle que présente les algorithmes de nos réseaux sociaux, chacun reste dans son monde. Ces sites de "réinformation" n’hésitent pas à sélectionner des extraits de journaux "mainstream" quand cela va dans leur sens, tout en les critiquant plus tard. Ce n'est que très récemment que ces journaux "mainstream" ont enfin consacré des lignes au décorticage d'information (Désintox de Libération, les décodeurs du Monde). Avec la mise en ligne de nombreuses données (agences gouvernementales comme l'INSEE par ex. etc.), il peut être facile pour le citoyen de vérifier des faits. Mais il y a une limite. Ne pas savoir analyser une donnée brute peut aussi amener à l'émergence de pseudo-médias à l'image des pseudo-sciences. Peut-être car les médias "mainstream" ont trop longtemps été de mauvaise qualité journalistique, couplé avec une mauvaise éducation des citoyens à la démarche critique.

Définitivement, ici, on a l'impression d'assister à un gloubiboulga. Sorte de pêche à la dynamite où tout est bon à dire. Qu'importe la justesse ou la justification des faits. L'important est de faire passer un message. Certains faits passés sont même transformés pour coller avec la nouvelle réalité. #BowlingGreenMassacre. lien

« Lorsque toutes les corrections qu’il était nécessaire d’apporter à un numéro spécial du Times avaient été rassemblées et collationnées, le numéro était réimprimé. La copie originale était détruite et remplacée dans la collection par la copie corrigée. 

Ce processus de continuelles retouches était appliqué, non seulement aux journaux, mais aux livres, périodiques, pamphlets, affiches, prospectus, films, enregistrements sonores, caricatures, photographies. Il était appliqué à tous les genres imaginables de littérature ou de documentation qui pouvaient comporter quelques signification politique ou idéologique. Jour après jours, et presque minute par minute, le passé était mis à jour. On pouvait ainsi prouver, avec documents à l’appui, que les prédictions faites par le Parti s’étaient trouvées vérifiées. Aucune opinion, aucune information ne restait consignée, qui aurait pu se trouver en conflit avec les besoin du moment. L’Histoire toute entière était un palimpeste gratté et réécrit aussi souvent que c’était nécessaire. Le changement effectué, il n’aurait été possible en aucune cas de prouver qu’il y avait eu falsification. »



Georges Orwell, 1984 (lien)

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